Eh eh, me voilà de retour
pour vous jouer un mauvais tour avec une petite nouvelle déclinée en plusieurs chapitres...
Enjoy !
Superman était un ahuri
Chapitre Un : Superman porte un slip rouge, moi j’ai un calbut à clous. Paris, qu’est-ce que c’est moche.
C’est gris. Pollué.Trop de bruit, trop de monde. J’ai l’impression d’être balloté par le courant d’une rivière d’eau sale, trop petit au milieu de géants pressés. Les odeurs ne me plaisent pas non plus. Les lumières m’éblouissent.
Enfin… En même temps, je n’ai vu de Paris que ce que m’a permis de voir le petit orifice que j’ai percé moi-même dans mon carton. Après avoir viré mon couvercle de boîte, et mis le souk dans mes couvertures. Ah, ça, mon futur proprio ne va pas aimer, et c’est ma compagnie qui va prendre. Broaf. J’allais pas voyager quatre jours empaqueté comme un saucisson, je suis un beau gaillard de soixante-quatre centimètres et demis, j’ai besoin de me dégourdir les jambes.
Bref. Reprenons. Ça fait quatre jours, oui, quatre jours, que je croupis dans un carton en étant balloté à droite et à gauche, quatre jours que j’ai quitté la Corée, et que j’attends d’arriver enfin dans mon nouveau chez moi. Au point où j’en suis, je suis tellement désespéré que même un appartement miteux et riquiqui dans le troufion du monde me satisferait, parce que vraiment, voyager,
j’en peux plus.
Mais j’ai l’impression que c’est pour aujourd’hui. Je suis pratiquement certain d’être en voiture – ah bah ouais, le chauffeur vient de klaxonner et de traiter un piéton de "méduse paraplégique" - ce qui veut dire que… Oui ! On me dépose chez moi. Bon. Pas bouger. Je dois résister à l’envie de regarder par mon petit trou, parce que ça ferait trop tanguer la boîte. Si le facteur pense qu’il y a une armada de bestioles dans ce qu’il transporte, ça ne va pas arranger mes affaires.
Bon… Des graviers qui crissent sous des semelles… Ce sera donc une maison avec jardin. Un coup de sonnette… Purée, faites qu’on ouvre, je ne vais pas en plus me farder un séjour forcé dans les locaux de la Poste !
Ah, des voix, cool. Ah, mince. C’est une fille qui a accueilli le facteur… J’espérais un mec. Bah… Au moins, j’aurai quelqu’un à mes ordres.
Je change de main. Pom pom pom. On me dépose à terre… Ah,la fille piaille. Eeeeh mince… Une fifille.
AH ! LUMIERE ! On vient d’ouvrir mon carton.
- Ooooh, mais qu’est-ce que c’est que ce bazar ? Mon dieu, mon dieu, faites qu’il ne soit pas abîmé !
Eh gamine ! Tu pries déjà le Dieu des Bishis pour que je n’aie pas de bobos ? Bah. J’ai la résine dure. Fraîchement moulé, je pète la forme, pour peu que tu aies un bon stock d’éponges magiques chez toi, je saurai entretenir mon sublime corps de mâle dans une forme olympique.
Elle me prend entre ses mains, me débarrasse de la mousse, du papier bulle,de mon casque. On s’observe mutuellement.
C’est une jeune fille. A peine majeure, je dirai. Petite, mignonne, avec des cheveux noirs trèèès longs, de grands yeux verts, un petit nez en trompette, et un petit visage très fin.
Ça, ça s’appelle une description concise.
Je la fixe. Habillée en noir de la tête aux pieds, c’est chaînes, clous, Doc Martens et compagnie. Maquillée comme un camion volé – c’est classe, mais c’est noir, on pourrai la prendre pour unmélange raton laveur/ panda – des ongles multicolores, et surtout,
super blanche, une humaine white skin, quoi. C’est pas humain d’être aussi blanche que ça. Un jour, un mec croira qu’il est à la montagne, du côté des neiges éternelles, et lui pissera dessus pour écrire son nom !
Bref.C’est une grosse gothique. Chouette, au moins, j’suis pas tombé sur une pouffe.
Ça, c’est une description
précise.
- Oooh, qu’est-ce que t’es beau…
Ah. Elle est lucide, au moins. En même temps, Miss, tu as déboursé plus de quatre cents euros pour que je sois à tomber par terre, non ?
Elle me pose sur un lit. J’entame un examen rapide des lieux. Je suis dans sa chambre, donc. C’est dark, on peut y gloomer en paix, j’imagine. Cool. C’est petit, mais je remarque déjà des choses intéressantes ; des films gores, des peluches trash, et une bibliothèque manga entièrement yaoiesque. Mais le mieux, dans tout ça : PAS d’autres Bishis en vue. Paaarfait.
Prem’s ! A moi la belle vie !
Je me concentre de nouveau sur elle, et moi. Moi… Je suis nu comme un ver, et chauve comme un caillou. Mademoiselle, il faudrait peut-être y remédier, non ?
Ah, elle prend les choses en mains. J’ai à peine le temps de réaliser, que j’ai hérité d’une superbe wig noir corbeau, lisse douce, qui me descend jusqu’aux fesses, ainsi que d’un sarouel fait main. Eh eh, elle ne se débrouille pas trop mal en couture, la p’tite. C’est intéressant ça. J’espère que ça ne veut pas dire qu’elle est trop fauchée pour m’acheter des tonnes et des tonnes de fringues, parce que là, on ne va pas être copains. Elle n’a pas de chance : je suis un fan inconditionnel de Crobidoll et de Nine9. Et ils sont chers, ces chacals.
Bref. Je viens de m’apercevoir qu’il me manque tout de même l’essentiel, dans tout ça ; un nom ! Eh oui.Le nom, c’est LA chose la plus importante pour nous, encore plus que le côté customisation. C’est le pacte tacite qui nous lie à notre proprio. Tant que je n’ai pas de nom, je ne suis rien. Je n’ai même pas le droit de m’adresser à elle.
Alors, dépêche, fillette !
Elle me fixe encore. C’est flippant, à la fin. Enfin, quoi, je suis beau comme un dieu, trouver un nom à la hauteur de mon éclatante magnificence est-il si difficile que ça ?
- Tu es parfait… Mais j’hésite trop…
Oh,génial… Elle va mettre trois heures à se décider.
- Je vais t’appeler…
Aaaah ?
- Christobald.
- PARDON ? Tu te fous pas un peu de moi, par hasard ?
Avec un cri digne d’un hamster coincé dans une porte, la gamine fait un bond en arrière pour se retrouver les fesses par terre, à me regarder avec des yeux de merlan frit.
- Eh, arrête de faire la morue, et change mon nom tout de suite !
- Mais… mais.. Tu.. Tu…
- Quoi, tutu ? Tu m’prends pour une ballerine ? Ecoute Miss,on ne va pas tergiverser cent ans, change mon nom, et ensuite, je t’explique.
- Euh.. Euh… Lynx ?
- J’ai une tête de gros chat ?
- Eeeuh… Eragon ?
- Pitié ! Et pourquoi pas Henry Potier, tant que t’y es ?
- Huuu… Lucius ?
- Nan ! Je sens les jeux de mots pourris !
- Hem… Lucifer ?
- T’as pas plus cliché ?
- Ben… Euh… Si Cristobald te plaît pas… Christabel, ça te va ?
- Hummm… Vendu.
Très content de moi, je m’assois en tailleur et me permets enfin de me gratter le bout du nez.Aaaaah. Le paradis. J’en oublierai presque ma proprio, qui, toujours vautrée par terre, me regarde avec un mélange d’effroi et de fascination. On dirait, que, dans ses prunelles vert sombre, brûle la flamme ô combien étincelante de la curiosité, la curiosité à l’état pur, noyée dans un océan de trouble et de stupeur.
Haha. J’aime être lyrique.
Bref, elle a les jetons, quoi.
Je soupire.
- Quoi ? Tu veux déjà me prendre en photo ?
Elle hésite. Se mordille les lèvres. Visiblement, elle ne sait pas trop si elle doit se prosterner devant moi, ou me balancer par la fenêtre.
Haha ! Je coûte quatre cents balles et des poussières, même pas peur !
- Euh… T’es une doll… Et… Tu parles ?
- Toi, t’es une cloche, et tu sais causer aussi, non ?
Elle cligne des yeux. Mouais, il faudrait peut-être que je baisse d’un ton…
- Bon, Miss. Oui, je parle. Parce que je suis ta doll. Je ne suis pas une barbie, tu comprends ? Je suis une doll, avec une vraie âme à l’intérieur.En fait, les compagnies BJDesques, c’est un peu comme des pompes funèbres, sauf qu’au lieu de mettre des cadavres dans des cercueils, elles, elle mettent des âmes dans des poupées. Haha, sympa, non ? Quoi, ça ne te fait pas rire ? T’es une goth pourtant, non ? Bon. Laisse tomber.
- Mais… J’ai déjà vu d’autres dolls. Et elles ne parlent pas !
- C’est normal. Tu crois qu’on va faire la causette à chaque humain qu’un croise ?
- Ma sœur et mes amies ont des BJD. Et elles ne m’ont jamais dit qu’elles parlaient.
- Normal aussi. Toutes les BJDeuses parlent à leurs dolls, mais elles se l’avouent très, très rarement entre elles, parce qu’elles ont peur de passer pour des folles, au cas où les autres BJDeuses auraient des dolls muettes.
- Ah… Bon… Alors, ça veut dire que ma sœur parle régulièrement avec ses six dolls ?
Woaw, six autres dolls dans la maison ? Galère. Il va falloir que j’impose ma suprématie.
- Oui, c’est ça. Enfin, si ses dolls aiment parler. Il y en qui sont de vrais ermites.
Ma proprio, au fil de notre échange, s’est rapprochée. A présent, l’extase la plus totale baigne son visage. Ah, ces humains…
- Mais… C’est trop cool ! C’est un peu comme dans Toy Story ?
Je hausse un sourcil poli.
- Je ne sais pas. Je ne connais pas. Enfin, bref, c’est bien joli tout ça, mais… On est où ?
- A Angoulême.
- C’est QUOI, ce bled ? Connais pas non plus.
- Euh… Toutes les dolls parlent comme toi ?
- Nan. C’est simplement que, moi, j’ai un style personnel et beaucoup de classe, sois heureuse.
La gamine cligne des yeux.
- Euh… Okay.
Attentivement, je l’examine de la tête aux pieds. Visiblement, elle est toute gentille, un brin naïve, et surtout pas méchante. L’esclave parfaite !
- Bon. Tu m’as donné un nom potable, mais je ne connais pas le tien.
Toute contente, elle me fait un grand sourire et me tend la main, amusée.
- Moi, c’est Elisabeth ! Mais tu peux m’appeler Effy.
Méfiant, je regarde sa main tendue.
- Chérie, va te laver les mains, s’il te plaît. Ma résine est très claire, je ne veux pas que tu me la crasse.
Toute gêné, elle retire sa main, et je la scrute.
- Elizabeth, hein ? Bah. C’est trop long. Et je n’aime pas "Effy".Je vais t’appeler Bébête. Bien, maintenant que les présentations sont faites… Je vais faire un petit somme, okay ? Je prends ton lit.
Heureux comme un roi, je me laisse tomber sur la couette moelleuse, et pousse un soupir d’aise.
Demain, dès que je serai reposé, je m’attaque activement à la réalisation de mon fantasme ultime :
Dominer le monde.
À suivre...Un bon point à qui devine le moule de Christabel.
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